Le vendredi 7 novembre 2020, Django publiait sa mixtape « S/O Le Flem ». Après des mois d’absence, l’artiste vient discrètement s’aventurer sur le terrain de la drill, épaulé par le producteur Flem. Certains y voient une énième adaptation d’un rappeur « caméléon », d’autres l’occasion enfin pour Django de briller.
Django, de son vrai nom Lazar Vachter, revient à son goût du kickage. Les productions drill viennent se mêler au flow sombre et agressif du rappeur. Alors que sa précédente mixtape « Tue Moi Mon Amour S’il Te plait », au style émo, n’avait pas rencontré son public, ce nouveau projet semble bien plus remarqué.
Pour préparer ce retour, Django s’est entouré d’artistes en pleine vogue tels quel Freeze Corleone, Gazo, ou Osirus Jack, et s’est appuyé sur la philosophie de cette mouvance underground pour articuler sa direction artistique. En témoigne le titre de l’opus : « S/O Le Flem », qui fait écho à la fameuse manière dont Freeze Corleone distribue les dédicaces dans ses morceaux. Ajouter à cela la qualité des productions de Flem, producteur phare du collectif 667 et architecte de l’album « LMF », pour permettre à Django une nouvelle exposition.
Cette mixtape qui impose ainsi une ligne directrice nette, fidèlement suivie tout au long des dix morceaux, propose un véritable step up artistique. Loin de l’aspect expérimental de son premier EP « Anthracite », qui manquait d’épaisseur, et de ses égarements emo-rap sur le projet « Tue-moi, mon amour, s’il te plait ». « S/O Le Flem » renoue avec le kickage sombre et percutant, artisant du succès de l’artiste.
Les productions sombres de Flem permettent aussi à Django de réinventer son style musical. Ses flows minimalistes et sa plume obscure s’accordent avec aisance aux instrumentales drill du beatmaker. L’occasion pour l’artiste de montrer qu’il a su s’affranchir de l’étiquette du multi-syllabiste à casquette, trop inspiré par le style de Nekfeu, que beaucoup lui avaient accordé à l’époque de ses singles Fichu et Oiseaux. Pour trouver une nouvelle identité ?
Souvent très proche d’une forme de mimétisme, Django marche dans les pas du courant drill qui frappe le rap français et s’est logiquement rapproché de ses acteurs les plus symptomatiques. Pourtant, l’artiste semble avoir renouvelé son style qu’il exécute avec tact.
Dans « S/O Le Flem », Django s’ose à des phrases chocs, qui se sont pas sans rappeler les phases d’un certain Freeze Corleone. Références énigmatiques et philosophiques, phrases polémiques, comparaisons obscures… Son univers sombre et introspectif se décline avec minutie. Il se démarque aussi par sa réduction des références en « comme », devenue une marque de fabrique, pointée du doigt pour son manque d’originalité.
« J’suis un homme blanc hétérosexuel aka tortionnaire »
« Fuck tous ceux qui sont bien pensants à défaut d’être pensants tout courts »
« S/O Gangster et Gentleman, j’suis Jacques comme Mesrine ou Lacan »
« Fuck les idiots utiles sous couvert d’humanisme et d’gouvernance mondiale sont les nouveaux nazis »
Django
La pseudo culpabilité blanche, ou encore la gouvernance mondiale, le rappeur joue avec l’imagerie complotiste et les polémiques récentes. Une approche qui peut sembler répétitive voir volontairement défaitiste pour les non-initiés à son style.
Sa patte provocatrice et parfois abusive trahit-elle une démarche opportuniste ? Si l’album s’inscrit dans un rap en marge, underground et sombre, éloigné des codes tendance du rap français, certains pourront regretter un aspect caméléon de l’artiste, qui s’accorde une nouvelle fois au codes musicaux en vogue.
Avec « S/O Le Flem », Django veut s’imposer comme un nouvel homme fort de la mouvance drill, avec un projet fidèle à l’univers torturé et marginal de la plume de l’artiste. Une harmonie musicale trouvée, qui pèche cependant par l’aspect répétitif de certains couplets, et à une forme de calquage à l’imagerie du 667. Des thèmes abordés de manière parfois maladroite, ou extrapolée, qui n’empêche pas au rappeur de briller par une technique et des flow maitrisés. Les productions de Flem et les nombreux invités subliment l’EP, et lui offre une réelle direction artistique. En attendant un premier album, Django offre ici le projet le plus abouti de sa carrière.
Mention : Coupable, S/O Le Flem, Pyramide, Fléau.