En 2021, quelques noms, pour certains encore presque inconnus des auditeur.trice.s, se sont faits entendre. Certain.e.s ont affiché des statistiques remarquables sur les plateformes de streaming. D’autres ont rempli des salles de concert avec une rapidité fulgurante. Ces artistes sont des révélations. Ils.elles viennent de passer un premier cap sérieux dans leur carrière et doivent désormais répondre aux attentes ou confirmer. La rédaction de Mosaïque vous livre sa sélection des révélations de l’année.
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Benjamin Epps, uppercut de velours
Arrivé dans le paysage du rap français à la fin de l’année 2020 avec son EP « Le Futur », Benjamin Epps a profité de 2021 pour étoffer son répertoire et s’imposer comme l’un des rappeur.se.s à suivre de ces prochaines années. Avec son projet « Fantôme avec chauffeur », concocté avec l’aide du Chroniqueur Sale, le rappeur fait étalage de ses capacités. Flows kickés, punchlines percutantes et trashtalking sur des instrumentales boom-bap dépoussiérées, Epsito remet au goût du jour une certaine manière de rapper tout en s’inscrivant dans son époque.
En plus de son dernier EP, l’auteur de Dieu Bénisse les Enfants s’est révélé à travers de nombreuses collaborations. Dinos, Vladimir Cauchemar, Selah Sue… Dans un featuring avec Zesau, il s’est essayé à la mélodie, rajoutant ainsi une nouvelle corde à son arc. Le MC originaire du Gabon ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Il devrait dévoiler son premier album dans l’année. Dans un entretien accordé à Mosaïque, entre deux répétitions dans la salle du FGO-Barbara à Paris (18e arrondissement), il confiait : « J’enregistrerai l’album à New York. Une semaine pour écrire les titres qui me manque et une autre pour tout enregistrer. Je veux avoir le mood, le grain, New York quoi ! Il me faut un studio qui a déjà accueilli des légendes pour avoir cet esprit là. »
- David Geenen
Ziak, noir c’est noir
2021. Les portes de la drill francophone sont enfoncées à coup de bottes renforcées. Ziak, lui, choisit de faire sauter le verrou avec la puissance d’un bélier. « Akimbo » insuffle un vent de fraîcheur électrique sur la scène française. D’influence britannique, le rappeur d’Évry déploie ses flows sur des productions aux breaks compulsifs. Il plonge l’auditeur dans une ambiance sombre et saillante. L’atmosphère ténébreuse trouve un écho dans les messages véhiculés : construction personnelle dans des milieux difficiles, course au paraître, poids de la société sur les désillusions d’une jeunesse enragée.
Crédit : Alexis Baa pour Mosaïque.
Le talent de Ziak repose sur sa faculté à prendre du recul sur cette situation. À ce niveau, Prière sonne comme un véritable aveu de repentance où le jeune artiste confesse ses erreurs passées. Dans une scène drill en pleine expansion, Ziak apporte une proposition concrète, novatrice. Tant les variations de tempo au sein de ses morceaux paraissent maîtrisées.
C’est d’ailleurs ce que confirmait en exclusivité le compositeur Focus Beatz à Mosaïque, auteur de sept prods sur le disque : « Après avoir écouté le morceau Fixette, je me suis dis qu’il y avait moyen que ça pète pour lui. Le flow, l’attitude… Il était différent. Il s’est réapproprié les codes de la drill UK. Artistiquement, je savais que ça allait aboutir. » À l’instar du guérisseur russe Raspoutine auquel Ziak fait souvent référence, le nouveau poulain du label Millenium pourrait bientôt être convié à la table des rois.
- Maxime Guillaume
Joanna, l’amour à grandes doses
Elle avait déjà été remarquée grâce à ses morceaux Séduction (2018) et Pétasse (2019). En 2021, Joanna s’est présentée à un plus large public avec « Sérotonine ». Un premier album qui installe un univers à fleur de peau où les mélodies cotonneuses contrastent avec les mots incisifs. En amont de la sortie du disque, l’artiste rennaise avait rencontré Mosaïque. Elle expliquait vouloir écrire l’histoire de « beaucoup de personnes qui commencent à flipper, à se poser trop de questions et à ne plus se faire confiance au moment où ils commencent à avoir des sentiments ».
Crédit : Alexis Baa.
« Sérotonine » parcourt les étapes des grands récits d’amour, de la rencontre au Goût de fraise à la lassitude qui se présente telle une Nymphe solitaire, en passant par la peur d’une Maladie d’amour. La poésie de Joanna ne s’embarrasse pas de respecter les frontières entre les genres, et l’autrice-compositrice jongle avec la pop, le RnB et même la trap dans Démons, sa collaboration avec Laylow. Un lyrisme qui devrait charmer de plus en plus d’auditeur.trice.s dans les prochaines années.
- Hong-Kyung Kang
So La Lune, le marathon 2021
Après une première mixtape couronnée de succès critique, So La Lune s’envole et signe une série d’EP. Le rappeur lyonnais originaire des Comores affirme son style et démarre l’année avec quatre projets : « Théia », « Satellite naturel », « Orbite » et « Apollo 11 ». La lune est partout, aussi bien dans ses titres de projets que dans sa musique, où on entend constamment « tsuki », qui signifie « lune » en japonais.
Crédit : Alexis Baa pour Mosaïque.
Son attirance pour cet astre, le rappeur l’explique par son mode de vie nocturne qu’il tente de traduire dans sa musique. Signé chez le label indépendant Low Wood, So La Lune s’est entouré de professionnel.le.s, venant faire taire les critiques qui pesaient sur ses textes sombres et sa voix aiguë auto-tunée. L’artiste a affiné sa trajectoire en 2021. Interrogé par Mosaïque en mai dernier, le rappeur le reconnaît : « Mes morceaux sont plus lisibles aujourd’hui. » Il clôture ainsi l’année avec « Failles », une suite de trois courts EP dans lesquels il mêle mélancolie et résilience. Pas besoin de faire de l’astrologie pour deviner que le succès du jeune rookie ne fait que commencer.
- Théo Lilin
Khali, une entrée fracassante
Tout au long de l’année, Khali paraissait aussi intouchable qu’insaisissable. D’une part, ses collaborations avec Malo, Chanceko et 99 se sont fortement distinguées sur la scène du rap underground. De l’autre, il a fait de sa créativité son principal atout avec son premier album « LAÏLA ». Sur ce projet, son troisième en deux ans, le rappeur bordelais a mis en musique ses états d’âme et la justesse de sa voix nasillarde.
Crédit : Antonio J. Ainscough.
Sur ses 11 titres, le rappeur prouve avoir passé un cap et confirme les attentes qu’il avait suscité à la sortie de son EP « Le tournesol » en 2020. Dans une année où la « new wave » a été une révélation pour grand nombre d’auditeur.trice.s, Khali est peut-être celui qui l’incarne le plus, malgré lui.
- Lukas Taylor
La Fève, l’audacieux
Il y a quelques semaines encore, les attentes et la pression étaient lourdes sur les épaules du jeune rappeur de Fontenay-sous-Bois. La Fève a su rentrer dans une nouvelle dimension en cette fin d’année avec une mixtape savamment préparée et adulée par la critique. Entré directement dans le top 10 des projets les plus streamés au monde sur Spotify lors de son démarrage, « ERRR » conclut une année en crescendo. Après une belle prestation sur « KOLAF », en septembre 2020, lui ayant permis de toucher un large public, Louis a su faire monter l’engouement autour de lui. Une ascension marquée par des apparitions toujours soignées. En featuring, comme sur le très bon Tous mes états avec J9ueve, mais aussi sur des projets collaboratifs de beatmakers comme ceux d’Unfamouslouie, du Blaze ou encore 99 & Wolfkid.
Crédit : Adrien Delmas.
« Le fougueux » est sur tous les bons coups de l’année. Une progression qui se matérialise lors de la sortie de Mauvais payeur le 21 octobre 2021. Le single, produit par Demna, marque le grand retour de La Fève en solo. Les compteurs s’emballent. Le personnage s’installe. La « ERRR » tape n’est pas encore annoncée que son succès est déjà quasi-assuré. Deux mois plus tard, c’est avec un généreux 18 titres que La Fève vient chérir son public. Un projet riche et cohérent qui réussit à ne pas tomber dans la redondance grâce à des morceaux courts et à une grande variété de productions. Une mixtape maîtrisée de bout en bout qui le fait définitivement sortir des buissons de l’underground.
- Robin Spiquel
Mention spéciale : Zamdane, le déjà révélé
Zamdane est-il une révélation de l’année 2021 ? Cette question a animé un débat passionné au sein de la rédaction de Mosaïque. Si le succès à grande échelle du Marseillais ne date pas d’hier, il vient de monter encore le niveau d’un cran. Révélé depuis son titre Favaro sorti en 2017, il était peut-être de ceux.celles sur qui la lumière est apparue trop tôt. 2,4 millions de vues sur l’un de ses premiers morceaux et la machine pensait être lancée. Après avoir dévoilé cinq freestyles Affamé en 2018, le jeune artiste prend une pause pour revenir en 2020. Reprenant alors quasiment de zéro, le jeune rappeur marocain revient avec d’autres intentions, de nouveaux flows, une nouvelle image. Et la métamorphose se concrétise réellement en 2021.
Crédit : Roxane Peyronnenc.
Avec une nouvelle façon de chanter et une écriture plus ancrée dans son quotidien, Zamdane trouve la combinaison parfaite pour faire passer de la mélancolie et dégager une sincérité qui lui est propre. Hayati, le freestyle Skyrock Le monde par ma fenêtre, ou plus récemment ses featurings avec la Fève, Dinos et JMK$ sont sûrement les morceaux les plus mémorables de Zamdane cette année. Son premier album sortira en 2022 et la tournée médiatique pour l’annoncer a déjà commencé. Le Marseillais tentera donc d’achever sa mue cette année avec un projet très attendu. Si son statut ne permet pas de le classer dans les Rookies Of the Year après ce qu’on peut considérer comme un faux départ, il ne fait aucun doute que le trophée de Most Improved Player (ce titre récompense le joueur ayant le plus progressé par rapport à l’année précédente en NBA, NDLR) est pour lui.
- Max Thomas
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