D’une tour de 130 mètres de haut, à l’Olympia, en passant par Pornhub, les artistes francophones du rap français ont fait dans l’innovation pour mettre en image leur musique. Mosaïque a retenu sept visuels qui ont marqué la rédaction par leur originalité, leur esthétisme ou leur symbole et vous livre sa sélection des plus beaux clips de l’année. Nota Bene : ceci n’est pas un classement.
Avant de vous plonger dans la sélection de la rédaction des clips de l’année 2021, merci de soutenir Mosaïque ! En nous lisant, vous soutenez un journalisme rap indépendant. Vos lectures et vos partages sont notre soutien le plus essentiel. N’hésitez pas à nous suivre sur les réseaux sociaux, et à recommander Mosaïque autour de vous !
Pour redécouvrir la sélection de la rédaction des clip du rap français de l’année dernière, cliquez ici.
Joanna — Sur ton corps
Quand Joanna choisit de briser les tabous autour de la sexualité, elle ne le fait pas à moitié. L’artiste aux accents pop et RnB a décidé d’embaucher le couple le plus connu du Pornhub homemade, LeoLulu, pour le clip de son single Sur ton corps, tiré de son premier album. En résulte deux vidéos réalisées par la chanteuse elle-même ainsi que la réalisatrice Ambrr. Une version érotique où les deux amoureux se câlinent dans un lit immaculé et une autre pornographique mêlant scènes de sexe explicites et ombres chinoises.
Derrière la caméra, Joanna tire les ficelles. « Je ne voulais pas que le focus se fasse uniquement sur le plaisir de la femme, mais plutôt sur celui des deux. Tout en étant consciente que mon point de vue est biaisé par nos constructions sociales », nous confiait l’artiste rennaise au début de l’année. L’ambiance à la fois sensuelle, électrisante et profondément féministe est saluée par la critique. Dès les premières images du clip, Joanna n’oublie pas de mentionner le travail du Strass, le syndicat du travail sexuel. Fidèle à ses engagements. Un pari réussi pour la jeune femme de 23 ans dont l’objectif était de parler de sexe crûment, sans faire la part belle à la culture du viol.
- Manon Bernard
Sopico — Slide
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le jeune « So », comme on le surnomme, sait faire une entrée fracassante. En juin dernier, l’artiste de 25 ans est revenu avec Slide, un morceau aux sonorités rock et au visuel percutant. C’est en tant que « rackeur » (jeu de mot avec rappeur et rockeur, NDLR) que Sopico aime désormais se présenter. Naturellement, il choisit de s’entourer de l’équipe du film « Mission Impossible » pour marquer son grand retour après un an d’absence.
La Tour Pleyel (Seine-Saint-Denis) de 130 mètres de hauteur, le saut dans le vide, les feux d’artifices… Sopico se met en scène comme protagoniste de son propre film. Rien a été laissé au hasard par ce cinéphile qui, plus jeune, rêvait de faire du cinéma : « L’enfant qu’on voit au début du clip, c’est le public qui m’attend et qui m’appelle pour me dire « il est temps ». Moi, je suis en train de rêver en haut de cette tour. Je me réveille et je décide de reprendre du service. La métaphore des ouvriers est totalement liée au fait que c’est un travail d’équipe, un chantier. Ce que l’on voit dans le clip, ce sont tous les éléments dont on avait besoin pour faire le disque », expliquait-t-il au Parisien .
- Imane Lyafori
Hamza — Réel
Un hangar, des voitures de luxe, une émeute, des fourgons blindés, Hamza et Zed. Le tout dans un noir et blanc parfait. Il n’en faut pas plus pour que Hugo Bembi et Sacha Naceri signent l’un des plus gros clips de 2021. Pour annoncer « 140 BPM2 », Hamza étale son flegme. Voiture de luxe, grillz sur les dents, lunettes de soleil et cigarette dans une main.
Acculé par des hommes cagoulés, il se moque d’eux en rappant son couplet bien au chaud dans son opulence. Dès le plan d’ouverture, le rappeur mène l’assaut accompagné de militaires en blindés. Hamza démontre son changement radical d’ambiance, que cela soit musical ou en termes de direction artistique. La colorimétrie s’attache à un noir profond et un blanc clinquant, choix surprenant et à contre-courant de ses précédents clips. Le Belge est prêt à partir à la guerre en toute décontraction avec son allié Zed, dans l’un des clips les plus épiques de 2021.
- Cyprien Joly
Sonbest — Terre Noire
Allongé près d’un personnage peint tout en noir qui s’agrippe à lui, un faisceau de lumière survole Sonbest. Seul moment d’accalmie dans une ambiance thriller. Un jeune garçon qui court à perdre haleine, une sorcière non-voyante et une forêt sombre… Terre Noire synthétise tout l’imaginaire de la musique de l’artiste. Le visuel est mis en image par son acolyte de la première heure, SwimTheDog. Pour Mosaïque, il expliquait : « La personne qui s’aggripe à lui, c’est son propre démon, une personne qui le hante. C’est un peu comme une paralysie du sommeil. Il ne peut plus bouger. » Inspiré d’un film d’horreur britannique « His House », un rite tribal tente de défaire Sonbest de ses démons en lui ôtant la vue.
Un clip fidèle à l’univers de l’artiste qui rappelle celui d’Agonie issu de son premier EP. Terre Noire, sorti le 10 juin 2021, annonce avec profondeur et cohérence le projet « Arcane » de Sonbest. Mais dont son réalisateur SwimTheDog préfère ne pas tout dévoiler : « La sorcière est non voyante, Sonbest a les yeux bandés… Ce sont des symboles de l’inconscient. Je voulais faire parler autre chose que le regard. Mais il y a plein de significations possibles. Je préfère laisser libre cours à l’interprétation. »
- Lise Lacombe
Damso — 911
Comment montrer un gangster qui soudain s’adoucit et laisse, en l’espace de trois minutes, transparaître ses sentiments ? C’est le défi que relève Adrien Wagner avec le clip de 911, sorti en début d’année. Le réalisateur laisse son empreinte et son style avec des effets spéciaux en pagaille et des mouvements de caméra à 360 degrés déjà utilisés sur ses précédents projets.
Produit par Adeus, on y retrouve un Damso qui baisse les armes. L’artiste se dit « ramolli » par le charme de la mannequin Noémie Lenoir, invitée à jouer dans le clip. C’est sans rappeler ces paroles du morceau Autotune, extrait de son premier projet « Batterie faible » : « Tout est noir comme Noémie Lenoir ». Du haut d’un immeuble, à un bar à l’ambiance tamisée, en passant par une plage déserte, Damso nous emmène dans un voyage envoûtant, au rythme de la mélodie du morceau. Le rappeur belge offre une vidéo digne du septième art, alliant avec justesse musique et visuel. De quoi faire figurer 911 parmi les plus beaux clips de l’année.
- Théo Lilin
Slimka — Hollywood
À l’image de ce que laisse imaginer le titre, Slimka traverse la scène pour adapter en image son morceau Hollywood. L’artiste nous plonge dans des décors de cinéma dont ceux de ses précédents clips. Poursuivi par les fans à l’arrière de sa voiture de luxe, Slimka se réincarne façon superstar. Loin de l’univers dystopique et sanglant des morceaux Rainbow et Headshot, auxquels Hollywood est rattaché, l’heure est désormais à l’egotrip.
Dans une succession prenante de plans séquence realisée par Exit Void, Slimka nous emmène à ses côtés, caméra embarquée, afin d’assister à son auto-interprétation. Mise en abyme de la production d’un des ses clips, le Genevois déroule au rythme de la prod explosive de Sectra et Kosei. Dans un entretien accordé à Mosaïque, le rappeur exprimait sa volonté de faire reconnaître la valeur du rap suisse. Propos corroborés à travers le morceau qui s’ouvre ainsi : « J’viens mettre les pieds sur la table, J’viens mettre Genève sur la carte. »
- Marius Sort
Mention spéciale : Vicky R, Le Juiice, Chilla, Bianca Costa et Davinhor - AHOO
« Icy, Juiicy, Vicky, Bianca, Pac-Man, c’est la folie. » Une folie et un projet qui fait du bien au rap français. Pour la première fois, cinq rappeuses se réunissent pour produire un morceau. Le documentaire « Reines, pour l’amour du rap » sur Canal+ dévoile sa conception. Durant quatre jours, elles se sont retrouvées dans une maison avec des producteurs pour écrire et clipper le morceau. Dans le visuel, à tour de rôle, Chilla, Bianca Costa, Davinhor, Le Juiice et Vicky R débarquent devant la caméra avec un style impeccable et de l’assurance à revendre.
Le clip réalisé par Jean-Charles Charavin s’impose comme un cri de rage des rappeuses. Elles s’affirment haut et fort sur la scène rap et s’unissent façon sororité pour le faire. Chacune y va de sa punchline et impose son couplet, le tout dans un décor théâtral. Chilla conserve sa voix angélique tout en ne mâchant pas ses mots pour s’associer aux notes brésiliennes de Bianca Costa. L’insolence de Davinhor se mêle à la trap de Le Juiice et à la puissance de Vicky R. Le clip a été tourné à l’Olympia, qui pour l’occasion, a orné sa devanture des noms en lettres rouges des cinq artistes, prêtes à prendre tout la lumière en haut de l’affiche.
- Manon Bernard
Si l’article vous a plu, n’hésitez pas à le partager ! Pour savoir les prochains articles à venir, abonnez-vous à notre newsletter :