Mosaïque
2021

L’année 2021 a été riche en sor­tie pour le rap français, avec des ren­dez-vous du jeu­di soir tou­jours plus chargés. La rédac­tion de Mosaïque a décor­tiqué tous les albums, mix­tapes et EP parus pen­dant les douze derniers mois et vous livre sa sélec­tion. Nota Bene : ceci n’est pas un classement.


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Lala &ce — « Everything Tasteful »

Lala &ce a su lancer l’année 2021 sous les meilleurs aus­pices avec « Every­thing Taste­ful ». Après la sor­tie du sen­suel sin­gle Show Me Love, l’album se devait de répon­dre aux attentes de ses nom­breux fans. Au fil des quinze pistes, l’artiste prou­ve qu’un album inno­vant peut ren­con­tr­er du suc­cès auprès de différent.e.s types d’auditeur.rice.s : des sim­ples curieux.se.s aux plus féru.e.s.

Après avoir étof­fé son style pen­dant plusieurs années sur Sound­Cloud, Lala &ce dévoile toutes ses qual­ités. Elle pro­pose un album à la direc­tion artis­tique tra­vail­lée et aux sonorités recher­chées. Des pro­duc­tions trap (Sipa) à celles aux atmo­sphères planantes et aéri­ennes (Para­pluie), la nou­velle favorite du rap game affiche une maîtrise qua­si-par­faite de son art, ren­dant l’ensemble homogène et plaisant à réé­couter. Lala &ce a trou­vé sa recette et aura mar­qué 2021 de son empreinte.

- Arthur Deux 

Damso — « QALF infinity »

Qua­tre ans après la sor­tie d’« Ipséité », l’alphabet grec de Damso est enfin com­plété. Après tant d’an­nées d’at­tente de la part des fans de la pre­mière heure, « QALF Infin­i­ty » sur­prend, déçoit ou impres­sionne. Une chose est sûre, le pro­jet divise. Trente-sept min­utes pen­dant lesquelles l’artiste s’amuse sur des prods var­iées comme sur Σ. Morose où gui­tare élec­trique et sax­o­phone se répon­dent. Le rappeur belge tranche la mélodie d’un piano en évo­quant ses sen­ti­ments blasés aux côtés de YG Pablo sur T. Chialer. Onze titres qui son­nent comme des mis­es en bouche pour pré­par­er ses auditeur.rice.s à de nou­velles sonorités.

Cet album nous dévoile un Dems assa­gi et plus équili­bré. L’artiste revient sur ses suc­cès, ses échecs, et évoque son ancien men­tor Boo­ba dans Ψ. Pas­sion, intro­duit par le sam­ple « I must be stronger », refrain de Traxx sur le titre Stronger. L’album est cer­ti­fié disque d’or dix jours après sa sor­tie et « QALF Infin­i­ty » est le qua­trième meilleur démar­rage en France en 2021, preuve que ses pris­es de risques musi­cales ont trou­vé leur public. 

- Char­lotte Joyeux 

La Fève — « ERRR »

La Fève est arrivé dans les arrêts de jeu de cette année 2021. Il pro­pose un opus mar­quant, dif­férent et assumé. Digne représen­tant de la « next-gen », cette nou­velle généra­tion de rappeur.se.s sans com­plexe. Accom­pa­g­né par des com­pos­i­teurs comme Kosei, Dem­na, Dai­go, Freakey et Guapo du Soleil, porté par le suc­cès de Mau­vais Payeur, il impose une propo­si­tion sub­tile­ment tra­vail­lée dans ses tran­si­tions et son esthé­tique globale.

« ERRR » est aus­si syn­onyme de prise de risque pour La Fève qui s’essaye à un plus grand pan­el de musi­cal­ités, sur des morceaux comme Saoulé, L’appel ou encore Lyele Out­ro qui son­nent plus mélan­col­iques et auto­tunés. Le suc­cès d’estime de ce pro­jet est symp­to­ma­tique d’un rap français qui évolue. Avec un pub­lic en con­stante recherche de nou­veautés. Lorsque c’est fait avec brio, on ne peut qu’applaudir.

- Cyprien Joly 

Zinée — « Cobalt »

Avec « Cobalt », Zinée affûte son art. Après son EP « Futée » sor­ti en 2020, la MC de la 75e Ses­sion enchaîne les tacles à la gorge. D’abord avec les cinglants morceaux d’egotrip Agrafe et Matière grise. Puis avec une accalmie portée par le tour­men­té Grena­dine et le pais­i­ble Par­le-moi en fea­tur­ing avec M le Mau­dit. Sans oubli­er un cer­tain sens du rythme, notam­ment sur WGA avec Sean.

Mosaïque avait ren­con­tré la rappeuse qui s’é­tait con­fiée sur son par­cours et ses angoiss­es de vie : « Les gens me dis­ent sou­vent t’as l’air super enjouée et pour­tant t’es triste dans tes sons. Je ne serai jamais dans une lumière totale et c’est quelque chose que j’ai com­pris très tôt dans ma vie. Accepter qui on est, c’est com­mencer à se soign­er et aller de l’avant. » 

La richesse créa­tive de Zinée résonne jusque sur la cov­er du pro­jet réal­isée par Bouher­rour. Un ciel som­bre que seule une sil­hou­ette de lumière éclaire, telle la voix limpi­de de la rappeuse au milieu des pro­duc­tions som­bres de Yung Keur et Shel­don. Zinée met égale­ment en place une écri­t­ure visuelle et ciné­matographique avec la chan­son Zinée club. De l’ex­péri­men­ta­tion tout en justesse. La jeune artiste en a prof­ité pour con­forter les attentes autour d’elle et s’est affir­mée comme l’une des nou­velles voix assumées de la 75e Ses­sion. Avec « Cobalt », Zinée prou­ve que le col­lec­tif a encore de beaux jours devant lui.

- Alex­is Pfeiffer

Dioscures — « Ciela »

« Ciela » signe la résilience intro­spec­tive d’un Dioscures enfin maître de son univers, après avoir été l’un des grands arti­sans du suc­cès de « Trin­i­ty » l’an passé. L’artiste avait fait part de son épuise­ment à l’Abc­dr du Son après les cadences de pro­duc­tion imposées par Lay­low. Alors, le temps de neuf morceaux, le pro­duc­teur explore ses influ­ences en don­nant la réplique à une mul­ti­tude d’interprètes. Des habitués de son univers artis­tique comme avec le déchi­rant et atten­du Ciné club en fea­tur­ing avec Lay­low, ou l’énergique mais tout aus­si poignant RE-45 signé Wit.

Pour le reste, Dioscures est allé chercher la chanteuse saou­di­enne Tam­Tam ou le duo Dame Civile, tou­jours en les emmi­tou­flant de sonorités min­i­mal­istes et à fleur de peau. « Ciela » est d’autant plus impor­tant qu’il signe la mise à l’écart de l’artiste vis-à-vis de la musique, lui qui avait annon­cé son retrait après ce pro­jet sur les réseaux soci­aux. L’al­bum a tout d’un tes­ta­ment expéri­men­tal qui donne ses let­tres de noblesse à un pro­duc­teur plus que décisif ces dernières années.

- Alex­is Pfeiffer

Laylow — « L’étrange Histoire de Mr. Anderson »

Pour ce deux­ième album, l’at­tente était à la hau­teur du remou provo­qué par « Trin­i­ty » un an aupar­a­vant. Alors que l’on pen­sait dif­fi­cile d’aller plus loin que son pre­mier album dans l’im­mer­sion audi­tive, Lay­low mon­tre qu’il n’en était qu’à l’échauf­fe­ment. Avec « L’é­trange His­toire de Mr. Ander­son », l’imaginaire som­bre de Tim Bur­ton a pris la place de l’univers numérique des machines. 

Un album à « ne surtout pas écouter en aléa­toire », comme l’avait prévenu l’artiste toulou­sain. Les inter­ludes entre chaque morceaux nous racon­tent les tiraille­ments entre lui et son dou­ble Mr. Ander­son. Un dou­ble-por­trait à la Mr. Jeck­yll et Mr. Hide qui nous fait pénétr­er dans un univers dont la réal­ité n’est plus recon­naiss­able, entre rêve et cauchemar, où le héros essaie tant bien que mal de s’arracher à son quo­ti­di­en pour vivre ses rêves. 

Lay­low fait le pari, dans un scé­nario mil­limétré, d’in­clure deux morceaux engagés con­tre les vio­lences poli­cières (Lost For­est) et les vio­lences con­ju­gales (HELP !!!). Le rappeur a aus­si ali­men­té son pro­jet d’un visuel tout aus­si tra­vail­lé avec le court-métrage éponyme de l’al­bum réal­isé par Osman Mer­can. Nek­feu, Hamza, Damso, Alpha Wann… Jey s’of­fre un cast­ing digne de celui qui a rem­pli deux Bercy en moins de quelques heures. Un album ven­du à 35.000 exem­plaires et un disque de pla­tine en poche, il trans­forme l’es­sai avec une propo­si­tion plus que jamais aboutie.

- Char­lotte Joyeux 

Joanna — « Sérotonine »

Séro­to­nine. L’hormone du bon­heur. En faisant vari­er le taux de séro­to­nine, Joan­na dévoile son pre­mier album. Elle nous pro­pose de suiv­re sur qua­torze titres une rela­tion amoureuse de sa nais­sance jusqu’à sa fin, puis à sa renais­sance. Chaque chan­son abor­de une étape de la rela­tion. La ren­con­tre sur Goût de fraise et la jalousie sur Séro­to­nine jusqu’à la révolte sur Alerte rouge sont explorées en mélangeant sonorités pop, trap et RnB.

Mosaïque a ren­con­tré Joan­na peu avant la sor­tie de son album début mai. Elle con­fi­ait vouloir avec « Séro­to­nine » retrac­er ses expéri­ences et com­pren­dre ses réac­tions lors de sa dernière rela­tion. Est-ce que tu veux rid­er offre ain­si une ode planante et mélodieuse à la nais­sance de l’amour. Seul artiste invité en fea­tur­ing, Lay­low développe avec elle les démons de la frus­tra­tion sur un morceau étince­lant, tan­dis que Sur ton corps célèbre la rela­tion char­nelle avec un clip disponible sur le site pornographique Pornhub. 

- Ben­jamin Watelle

Luv Resval — « Étoile Noire »

De la douceur des plaines d’Hyrule à la dureté des parois de l’Étoile Noire. Alter­nant entre moments de mélodies mélan­col­iques et de tech­nique flam­boy­ante, Luv Resval nous plonge dans son univers imprégné de références à la pop cul­ture. Depuis 2017, le jeune rappeur s’est con­stru­it une com­mu­nauté de fans sur les réseaux soci­aux qu’il a fait patien­ter jusqu’au début de l’été. Cer­tains titres comme Cette fille avaient par­fois été teasés sur son compte Twit­ter plus d’un an aupar­a­vant. Avec son pre­mier album « Étoile Noire », l’artiste de 22 ans mon­tre le fruit de son tra­vail avec le label AWA du pro­duc­teur Kore qu’on retrou­ve à la pro­duc­tion de plusieurs titres. 

Pour l’occasion, il invite cinq rappeurs à col­la­bor­er avec lui. Sur deux morceaux avec son frère Sav­age Tod­dy, une alchimie naturelle se dégage, tout comme avec son men­tor Alkpote pour la suite du titre Célébra­tion sor­ti sur leur pro­jet com­mun en 2018. Les col­lab­o­ra­tions avec Jos­man, Chi­ly et Lujipeka per­me­t­tent de met­tre en avant les dif­férentes facettes de sa per­son­nal­ité. Sur les pro­duc­tions som­bres, Luv Resval brille et impose son style. 

- Ben­jamin Watelle

Tuerie — « Bleu Gospel »

Tuerie, artiste, paroli­er du label Foufoune Palace a délivré sans crier gare un EP plus intimiste que jamais. Très riche musi­cale­ment, « Bleu Gospel » est un chant d’espoir. Au fil des huit morceaux, il racon­te bru­tale­ment son enfance, mar­quée par la vio­lence, et sa rémis­sion. Seule touche de ver­nis sur une réal­ité qu’il n’a pas souhaité embel­lir : l’ambiance gospel et la richesse musi­cale qui por­tent son propos. 

Dans un entre­tien exclusif, le rappeur s’é­tait livré à Mosaïque pour un échange touchant, à l’origine de ses peurs jusqu’à sa guéri­son dans lequel il con­fi­ait à pro­pos du morceau phare du pro­jet : « Il fal­lait que je mette à nu mes peurs. J’ai été cher­ché des répons­es auprès de mon père. À par­tir de ce moment-là, j’ai enfin pu met­tre le morceau que j’imaginais depuis mes 14 ans en musique. Tiroir bleu est né. » Dépeignant les boule­verse­ments de son exis­tence, son œuvre sur­prend par son impres­sion­nante palette de couleurs. Notam­ment par des pro­duc­tions qui peu­vent être rafraîchissantes comme pesantes. Hum­ble et arro­gant à la fois, Tuerie a réus­si, en moins de vingt-sept min­utes, le pari d’embarquer son pub­lic dans le réc­it de sa vie.

- Amaël Coquel

Orelsan — « Civilisation »

« Civil­i­sa­tion », c’est un deuil à faire. Celui du Orel­san nos­tal­gique, tour­men­té, tirail­lé. On redé­cou­vre un homme apaisé, heureux, prêt à sor­tir un album ambitieux et sen­ti­men­tal, dénué de vul­gar­ité. Orel­san n’est plus Si seul, mais Seul avec du monde autour. C’est cette démarche fédéra­trice qui cristallise le pro­pos de « Civil­i­sa­tion ». Un disque rassem­bleur, aux couleurs musi­cales éclec­tiques, où cha­cun peut y trou­ver son compte. L’album est aus­si LA grande réus­site de Skread. Le pro­duc­teur se renou­velle et se mod­ernise sur des titres comme Baise le monde et ses accents dis­co ou Ensem­ble et ses envolées éléctro.

Civil­i­sa­tion n’en reste pas moins un disque cli­vant, notam­ment par ses sujets répéti­tifs et par un Orel­san beau­coup moins cru mais qui n’a jamais aus­si bien chan­té le bon­heur. « Civil­i­sa­tion » est une page qui se tourne, un nou­veau départ, ou peut-être… une dernière étape.

- Jules Careau 

Khali — « LAÏLA »

C’est quelques mois après une par­tic­i­pa­tion remar­quée sur l’EP « Kolaf », de ses com­pères La Fève et Kosei, que Khali a fait son retour. Avec « LAÏLA », le rappeur éclaire de sa voix nasil­larde un mois de mai par­fois calme en ter­mes de sor­ties musi­cales. Un véri­ta­ble vent de fraîcheur sur la scène rap fran­coph­o­ne, qui con­firme les espoirs placés en ce jeune rook­ie bor­de­lais, et nous immerge dans son univers ouverte­ment mélan­col­ique. Au tra­vers de l’album, Khali nous plonge plus pro­fondé­ment au sein de son intim­ité, de ses nuits emplies de tristesse et de remis­es en ques­tions comme sur La Toile : « Cette nuit, j’ai pleuré beau­coup pour écrire, moral gâché pour vous sor­tir un disque. » 

L’artiste assume entière­ment son iden­tité musi­cale, tant dans l’utilisation cri­arde de sa voix que dans son approche plus per­son­nelle. Et ce n’est pas pour déplaire à son pub­lic, qui a acclamé le pro­jet à sa sor­tie, ni à la cri­tique majori­taire­ment élo­gieuse. Plus qu’un suc­cès, « LAÏLA » est égale­ment un sym­bole. Le sym­bole d’un pla­fond de verre brisé, pour lui et ses acolytes de la « new wave », aux prémices d’une large recon­nais­sance. Can­ton­né à un rap de niche sou­vent asso­cié à Twit­ter, Khali a prou­vé qu’il est pos­si­ble d’ou­vrir sa propo­si­tion. Même s’il reste encore beau­coup à accom­plir, il peut se féliciter d’avoir rem­pli la salle de con­cert de La Boule Noire en moins de cinq min­utes, signe de l’en­goue­ment qu’il provoque.

- Mar­ius Sort

Squijdi — « Ocytocine »

De la fièvre blanche des pas­sions nais­santes à la mélan­col­ie bleue des pre­miers doutes. Avec « Ocy­tocine », Squid­ji se rep­longe dans les moments qui ont façon­né son exis­tence et revit les élans des longues nuits parisi­ennes. Tan­dis qu’il arpente les rues de la cap­i­tale, une his­toire d’amour se des­sine en fil­igrane. Après le suc­cès cri­tique de son EP « Parades », paru en 2020, Squid­ji mon­tre toute l’étendue de son poten­tiel. Ce pre­mier album stu­dio baigne dans une déli­catesse tan­tôt brumeuse, tan­tôt ensoleil­lée. Mosaïque avait assisté à l’a­vant-pre­mière de l’é­coute de l’al­bum avant de pou­voir échang­er avec l’artiste qui con­fi­ait « ne pas se ren­dre compte » de l’en­goue­ment qui l’entoure.

Le rappeur du 15e arrondisse­ment de Paris cray­onne son réc­it avec une large palette de couleurs et de styles, et les morceaux au style hip-hop très mar­qué s’enchaînent aux côtés de chan­sons de RnB velouté et des titres à l’énergie élec­tro. Les instrus sont signées par son « équipe d’Avengers » : Prin­z­ly, Ponko, Paco del Rosso et Saint DX, et de nom­breux invité.e.s dont Jos­man, Lous and The Yakuza, Dis­iz ou Lala &ce vien­nent enrichir la track­list. Telle une véri­ta­ble molécule de plaisir, « Ocy­tocine » embrase avec fris­son les pas­sions de chacun.e.

- Hong-Kyung Kang

EDGE — « OFFSHORE »

« Dans six min­utes, il sera six heures ». Entre les ténèbres et la lumière, entre la nuit et le jour, EDGE entame son pro­jet avec la son­ner­ie d’un réveil, annonçant l’entame d’une nou­velle journée. Le par­al­lèle avec son début de car­rière est tout trou­vé. L’artiste de Grand Ville Records se dévoile dans cet album intimiste et per­son­nel. EDGE choisit de s’exprimer sur sa rela­tion au temps, ses sou­venirs enfouis et ses failles qu’il peine à refermer. 

Au coin d’une table du restau­rant de l’hôtel Amour à Paris, Mosaïque a pu ren­con­tr­er Edge qui s’est con­fié. « Le temps, c’est spé­cial pour moi. Je n’ar­rive pas à chérir les moments par peur de ce qui va se pass­er le lende­main. J’ai peur de me réveiller un matin, comme ça a pu m’arriver, et qu’on me dise, cette per­son­ne n’est plus là. Sans que ça n’ait pu m’effleurer la tête que ça puisse arriv­er. »

Par l’expression de cette douleur, le natif du 19e arrondisse­ment parisien choisit d’emprunter la voie de la sincérité et de l’ouverture, d’amener l’auditeur pour un voy­age au cen­tre de son être. S’entourant des porte-dra­peaux de la « new wave » (La Fève, Jäde) et du cacique des lyri­cistes fran­coph­o­nes : Alpha Wann sur le morceau 20.000, Edge livre un opus fon­da­teur pour la suite de sa car­rière. Il pose les bases d’un univers aux con­tours pro­fonds et à la plume sen­si­ble. OFFSHORE est prêt à envoy­er EDGE faire le tour du monde, et ce, pen­dant plus de 80 jours. 

- Maxime Guillaume

Slimka — « Tunnel Vision »

En étof­fant son style avec « TUNNEL VISION PRELUDE », Slim­ka traçait déjà les con­tours d’une ascen­sion con­fir­mée par cet album, tein­té de ver­sa­til­ité musi­cale et d’innovation. Sûr de lui, il déclarait à Mosaïque dans un entre­tien à l’oc­ca­sion de la sor­tie : « Je ne vous cache pas, j’ai assez con­fi­ance. Je sais qu’avec ce pre­mier album, je suis resté fidèle à moi-même. J’ai sim­ple­ment fait évoluer mon délire et mon iden­tité. » En s’alliant à PH Trig­ano, Kosei, Var­nish La Piscine ou Guapo du Soleil, le rappeur struc­ture l’ossature de ce riche pro­jet à la con­struc­tion réfléchie. Avec un tra­vail sur les tran­si­tions et les effets de style, il facilite l’immersion et cloi­sonne son univers dans un tun­nel vecteur de créativité.

Il syn­thé­tise cette volon­té de par­faire son style en mag­nifi­ant ses pro­pres codes. Et parvient à se gref­fer à d’autres grâce à un pan­el de fea­tur­ings fran­co-genevois com­posé de Lay­low, Cap­tain Roshi, Var­nish La Piscine, Makala et Dimeh. Afin de tou­jours acér­er l’acuité de sa vision, l’attention est portée sur une iden­tité visuelle mar­quée. La direc­tion artis­tique est d’ailleurs signée Exit Void, un crew audio­vi­suel suisse. Les clips de Head­shot, Hol­ly­wood et Rien sans rien font éman­er un souf­fle d’inspirations divers­es. Des néons de Wong-Kar-Wai au style dystopique des bolides hurlants de Rid­ley Scott. Cette ébul­li­tion visuelle est le coup de grâce porté à la vision mil­limétrée de ce dix-huit titres aux aspi­ra­tions triomphales.

- Cédric Rossi

SCH — « JVLIVS II »

Sor­ti le 19 mars, le sec­ond volet de la trilo­gie de SCH, « JVLIVS II », a con­quis son pub­lic. Après dix heures par jour en stu­dio pen­dant près d’un an et demi, le rappeur livre vingt-et-un titres, dont deux bonus. Le S y pour­suit son intro­spec­tion amor­cée dans « JVLIVS », sor­ti en octo­bre 2018. Cette intim­ité partagée cul­mine dans le dernier titre, Loup Noir. SCH accom­pa­gne la sor­tie d’un court métrage, « JVLIVS II : Le Jour d’Avant », dans lequel l’artiste revient sur le chem­ine­ment de cette trilogie. 

Au fil de l’album, la voix du nar­ra­teur évoque des sou­venirs aux fans de ciné­ma améri­cain. Et pour cause, il s’ag­it de celle de José Luc­cioni, la voix française d’Al Paci­no. Côté fea­tur­ing, SCH invite notam­ment Freeze Cor­leone. Une col­lab­o­ra­tion qui donne nais­sance au titre Mannschaft, par­faite­ment dans le ton de l’univers som­bre et vio­lent de l’album. On dansera en revanche sur Mode Akim­bo, titre décrié tant il détone de l’u­nivers de SCH sur lequel il con­vie Jul, son com­parse de « Bande organisée ». 

- Emma Jacob

Mention spéciale : Sonbest — « Arcane »

Sonbest a remué la terre pour laiss­er éclore les bulbes de son imag­i­na­tion, préférant enter­rer der­rière lui ses précé­dentes plan­ta­tions. La pochette, réal­isée par Hoda Hoda, reprend cette idée. Sonbest, une faucheuse à la main, bal­aie la terre noire dans laque­lle sont plan­tées des fleurs de Lotus des­tinées à dis­paraître (Lotus est le nom de son pre­mier EP). Ce n’est donc pas par hasard que le rappeur de la « new wave » annonce son deux­ième pro­jet avec le titre Terre Noire, accom­pa­g­né d’un clip à l’imagerie ciné­matographique dont il est cou­tu­mi­er. Der­rière la caméra, son bras droit, le réal­isa­teur SwimThe­Dog, directeur artis­tique du pro­jet inti­t­ulé « Arcane » explique pour Mosaïque : « L’Arcane, c’est la 13e carte du tarot de Mar­seille. Ça veut dire aller de l’avant en bal­ayant le passé. C’était une belle signification. » 

Sonbest s’illustre donc par des nou­velles pris­es de risque, à l’image du morceau Béni ou Mau­dit où le rappeur à l’univers très som­bre se mon­tre plus roman­tique. Il offre aus­si un pre­mier fea­tur­ing, seule et unique col­lab­o­ra­tion, avec son ami DMS. C’est lors d’une séance en avant-pre­mière dans un ciné­ma parisien que Sonbest avait dévoilé son pro­jet. Pour l’occasion Khali, Chanceko, DMS ou encore le pro­duc­teur Guapo du Soleil étaient réu­nis, incar­nant ensem­ble cette énergie créa­trice involon­taire de la nou­velle généra­tion résumée par SwimThe­Dog : « Je pense que ce qu’on pro­pose est nova­teur sans vouloir l’être. »

- Lise Lacombe


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