On la surnomme « la pépite de la Côte d’Ivoire » et ce n’est pas « Queen Pepita » qui dira le contraire. Autour d’un café à Saint-Denis, nous avons rencontré Andy S alors que la rappeuse ivoirienne de 24 ans est en France pour une série de concerts après la sortie de son dernier projet, « Exousia », en novembre dernier.
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Tejdeen
«Prend des photos de l’interview Momo ! ». Alors que 160 000 personnes la suivent sur son compte Instagram (@andys.therapper), Andy S est également présente sur Snapchat, Instagram ou encore Facebook. Très proche de ceux.celles qu’elle a baptisé sa « Team Pepita », elle n’hésite pas à impliquer son manager, Omomine, dans le maintien de ce lien virtuel.
Si peu de rappeur.se.s sont aujourd’hui actif.ve.s sur le réseau social au carré bleu, Andy S, elle, cumule 136 000 abonné.e.s sur sa page Facebook, qu’elle abreuve de contenu autant que son fil Instagram. En effet, sa carrière a débuté sur la plateforme. « J’ai commencé à poster mes freestyles sur Facebook », rembobine-t-elle. Alors lycéenne, la jeune femme de 15 ans, déjà fervente consommatrice d’artistes comme Booba ou la Sexion d’Assaut, assiste aux freestyles de ses camarades de classe tous les vendredis soir, devant le lycée.
Andy S. Crédit : Lia Goarand pour Mosaïque.
Passionnée, elle se lance timidement dans l’écriture. « Un jour, j’ai montré ce que je faisais à un pote qui m’a convaincue de me lancer. » Le vendredi suivant, Andréa, de son vrai nom, performe à son tour. « Tout le monde était choqué ! Surtout, il n’y avait pas d’autres meufs », se souvient celle qui est aujourd’hui bien installée sur la scène rap ivoirienne.
S’imposer en tant qu’artiste féminine
Multipliant les freestyles sur ses réseaux, elle est repérée en 2017 par un premier label à Abidjan. S’ensuivent les premières séances studio, la réalisation de clips et les passages dans les médias ivoiriens. « Ils m’ont aidée à me professionnaliser », conclut-elle. En 2019, elle sort son premier EP « Le Rap N’a Pas De Sexe » dans lequel elle revendique sa place de femme dans le milieu très masculin du rap, notamment en Côte d’Ivoire. « C’était une prise de position. Quand on pense « rap » on pense « rappeur », alors que justement, le rap n’a pas de sexe. Il faut prendre des gens bons dans leur domaine, c’est tout », tranche la jeune femme, consciente du rôle qu’elle a choisi d’endosser. « Même si tu ne peux pas changer le monde, tu peux toucher quelques personnes, faire passer des message et impacter les mentalités. »
Quand Andy S pense rap.
Andy S. Crédit : Lia Goarand pour Mosaïque.
Quand Andy S pense rap.
Mais les stéréotypes sexistes ont la peau dure. En promotion pour la sortie de sa mixtape « Exousia », l’artiste était récemment questionnée sur son look jugé « trop masculin » par l’animateur d’une chaîne ivoirienne. À l’évocation de ce souvenir, la rappeuse échange un regard avec son manager avant d’esquisser un sourire. « Sur certains plateaux télé en Côte d’Ivoire, je suis sûre d’avoir à chaque fois des questions à ce sujet. En France, les médias sont beaucoup plus focus sur ta musique, ton parcours, tes positions… »
Andy S : « Je veux que les gens se retrouvent dans mes textes »
Dans le titre TTLH (Tu Te Lances Hein), dont le clip est sorti le mois dernier sur YouTube, Andy S ne mâche pas ses mots : « J’arrive ici y’a personne qui m’égale, je sais que je régale je bouffe le game (…) ». Même si elle ne semble pas craindre la critique, la jeune artiste ne fait pas dans l’egotrip dans le seul but de se mettre en avant. « Je veux que les gens se retrouvent dans mes textes. Quand je dis “N°1 fuck la modestie” (dans le morceau Rap décalé avec Vicky R et Yanik Jones, NDLR), c’est pour que les gens puissent s’identifier et prendre confiance. C’est la dynamique première du projet. »
Andy S. Crédit : Lia Goarand pour Mosaïque.
Une démarche qu’elle a aussi souhaité imager grâce à la pochette de sa mixtape, sur laquelle on devine le Christ crucifié. « Les catholiques savent que Dieu a pris tous nos péchés en allant sur la croix, explique-t-elle. J’ai un peu cette position dans le rap ivoirien. Je subis toutes les critiques pour que d’autres femmes aient l’audace de se lancer ensuite. »
Andy S envisage de s’installer en France
Aujourd’hui, Andy S est confiante. « En Côté d’Ivoire, même si j’étais soutenue par mon public, certains ont essayé de me décourager, car le rap à message, où ça kick, n’était pas la musique la plus écoutée ». Présente en France pour ses premiers concerts, force est de constater que sa persévérance a payé. « Savoir que j’ai continué et qu’on m’a invitée pour me produire, qu’on a payé mon billet d’avion, qu’on m’a donné un cachet… Tu t’assois et tu te dis que c’est lourd. »
À Paris pour quelques semaines, l’artiste a aussi à cœur de rencontrer son public, comme lors du « meeting » prévu le lendemain dans le XIème arrondissement. Bien que le climat parisien diffère de celui d’Abidjan, comme elle aime le faire remarquer, Andy S envisage de s’installer en France. « Ce qui me plaît, c’est qu’ici il y a cette culture du rap. Même s’il y a différents styles, il y a de la scène pour tout le monde », conclut-elle en faisant référence à Benjamin Epps, dont elle apprécie la musique. « D’ailleurs, s’il y’a moyen de le contacter… », ajoute-t-elle en riant, intrépide mais déterminée. Comme à son habitude.

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