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Trois ans après le suc­cès de son hit Trap Bel­di (19 mil­lions de vues sur YouTube, NDLR), Issam s’est fait une place par­mi les fig­ures émer­gentes du rap maro­cain. Aux côtés de stars mon­tantes comme Zam­dane, ElGrandeTo­to ou Maad, le jeune artiste a rapi­de­ment grav­it les éch­e­lons et s’est fait, mal­gré lui, affubler du titre de « prince de la trap ».

Depuis Derb Sul­tan, son quarti­er de tou­jours, il nous accorde un moment en visio­con­férence. Covid-19 oblige, l’artiste n’a pas pu se déplac­er pour hon­or­er son pre­mier disque « Crys­tal » d’une pro­mo­tion en bonne et due forme. Pas moyen, non plus, de ren­con­tr­er son pub­lic gran­dis­sant à l’occasion des fes­ti­vals d’été. Pour­tant, Issam à le sourire. Fraîche­ment sor­ti de son lit, dans un français flu­ide quoique par­fois hési­tant, il s’est livré à Mosaïque.

« Sor­tir un bon album, un bon tra­vail, c’est pren­dre son temps. Je l’ai pré­paré pen­dant presque deux ans. C’est pas facile de boss­er sur un album solo, il faut choisir les bons morceaux et créer une his­toire », explique spon­tané­ment Issam. Imper­méable au rythme effréné de l’industrie, l’artiste a pris le temps de pos­er ses mots et artic­uler un univers qu’il a nom­mé « Crys­tal », son pre­mier album, dévoilé le 7 mai 2021. « Crys­tal, c’est un monde dans lequel je par­le de mes rêves que je note au réveil, de mon entourage, de mes expéri­ences, de mon enfance… Mon enfance me manque. J’ai beau­coup de sou­venirs avec mes par­ents. Pour moi, la musique c’est tou­jours d’exprimer ce que tu ressens, ce que tu dégages. J’essaye de surfer sur cette vibe pour écrire. » Il prévient : « Les gens pren­nent moins de temps pour com­pren­dre les propo­si­tions des artistes. J’espère que le pub­lic le fera pour ce pro­jet, il est fait pour ça. »

Le précurseur de la « traï »

Avec ce pre­mier jet, pas ques­tion pour le rappeur de faire l’impasse sur l’un de ses traits artis­tiques. Rap, pop reg­gae, éléc­tro… Issam a con­cen­tré ses inspi­ra­tions en prenant soin de tou­jours les reli­er au raï (un genre musi­cal né en Algérie au XXe siè­cle et qui s’est inter­na­tion­al­isé dans les années 1990, NDLR). Pour con­denser ce cock­tail de son, le rappeur « cherche beau­coup » avant de servir le nou­veau mélange. Finale­ment, le Maro­cain se tar­gue de pou­voir aujourd’hui pro­pos­er un style unique : « La traï », révèle-t-il en prenant soin de bien artic­uler pour ne pas écorcher ce néol­o­gisme. « C’est un mix entre la trap et le raï. Je veux pou­voir mod­erniser le raï tra­di­tion­nel et pro­pos­er un style qui porte notre cul­ture et que tout le monde puisse écouter. »

Pour mieux se présen­ter au pub­lic, Issam a opté pour un for­mat de vingt titres, avec pour seul fea­tur­ing CA$HPASSION, aka Jim­my Cash, rappeur mais aus­si ingénieur du son pour le label Cac­tus Jack de Travis Scott. Sur le morceau La Ville Des Mer­veilles, les deux hommes sig­nent leur pre­mière col­lab­o­ra­tion. « C’est très bon track qui cor­re­spond à l’én­ergie de « Crys­tal ». Il était prévu sur un pro­jet à lui, mais il a accep­té que je le récupère. » Le Cal­i­fornien s’est aus­si chargé du mix­age du disque en partageant avec l’artiste son exper­tise. Issam con­firme : « Je suis très per­fec­tion­niste et il a été très bon pour le mix. Il m’a appris beau­coup de choses là-dessus. Ce n’est pas évi­dent que quelqu’un qui tra­vaille avec Travis Scott vien­nent vers toi. J’ai eu la chance qu’il me dise : « Ouais, j’aime ce que tu fais, je veux boss­er avec toi ». Pou­voir tra­vailler avec des gens comme ça c’est une chance, ils ren­dent ce que tu crées encore mieux. »

« Au Maroc, on a pas de label. J’ai reçu pas mal de propo­si­tion, mais pas d’ici. Il n’y a pas de struc­tures ou d’industrie. Les artistes se débrouil­lent com­ment ils peu­vent, en cher­chant com­ment gag­n­er de l’argent. »

Issam à Mosaïque

CA$HPASSION n’est d’ailleurs pas le seul pro­duc­teur inté­gré à la scène améri­caine à s’être rap­proché de lui. Sur la track­list fig­ure aus­si le nom du très dis­cret Prince 85, égale­ment Maro­cain et con­nu pour son tra­vail auprès de The Week­nd ou 21 Sav­age. Dou­ble­ment hon­oré de ces atten­tions, Issam se sou­vient : « Il m’a envoyé un mes­sage sur Insta­gram en me dis­ant qu’il voulait tra­vailler avec moi. Se faire repér­er par un pro­duc­teur qui a vingt ans d’expérience qui voit ton poten­tiel, ça fait plaisir. Finale­ment, on a fait six morceaux ensem­ble. » Quoiqu’il en soit, le rappeur insiste : il a préfère pro­pos­er plusieurs couleurs et diver­si­fi­er la pro­duc­tion de son album en faisant appel à d’autres beat­mak­ers, comme Adam K ou Taem­inTekken : « Je voulais plusieurs style et que les gens ne s’ennuient pas », con­fie-t-il.

Une inspi­ra­tion out­re-Atlan­tique qui vient même par­fois remuer ses textes, en témoigne sa phase sur « le pays de Franck Ocean » (un rappeur cal­i­fornien, NDLR), dans le morceau Rai Machi Punk. Néan­moins, le rappeur nuance : « Ce que je veux dire, c’est que c’est mon quarti­er qui m’a soutenu et pas les États-Unis. Ce n’est pas un clash, mais je voulais dire que ce qui m’a aidé à devenir ce que je suis c’est mon quarti­er et les miens, pas des voy­ages dans d’autres pays. » Issam habite tou­jours dans son quarti­er, Derb Sul­tan, à Casablan­ca. Un haut lieu d’inspiration pour l’artiste : « C’est très pop­u­laire ici. Plusieurs acteurs, musi­ciens, joueurs de foot­ball, acteurs en sont sor­tis. Il y a beau­coup de vie et plein de gens qui réus­sis­sent aujourd’hui. La ville de Casablan­ca m’inspire aus­si beau­coup. Il y a un grand con­traste, les gens et les endroits ne se ressem­blent pas. Ça move ! » Ses par­ents sont aus­si tou­jours près de lui et représente un sou­tien indé­fectible, tout en restant sobre : « Le pre­mier jour où j’ai com­mencé, c’est mon père qui m’a soutenu. Ils sont fiers de ma réus­site. Mais il ne par­le pas de ce que je fais. On par­le d’autre chose et ils dis­ent : “Voilà c’est son job, c’est cool.” ».

Le vrai visage de l’industrie

Pour­tant, si sa terre natale lui donne un souf­fle de créa­tion, Issam a dû voir au-delà de ses fron­tières pour faire grandir sa musique. « Au Maroc, on a pas de label. J’ai reçu pas mal de propo­si­tion, mais pas d’ici. Il n’y a pas de struc­tures ou d’industrie. Les artistes se débrouil­lent com­ment ils peu­vent, en cher­chant com­ment gag­n­er de l’argent. » Repéré et signé depuis 2019 sur le label Island Def Jam d’Universal Music France, il fait aujourd’hui la part belle à l’indépendance.

Il nous racon­te : « Les labels n’ont pas de valeur ajoutée. Les artistes ici au Maroc ne con­nais­sent rien de tout ça, c’était mon cas avant de sign­er. Uni­ver­sal est venu plusieurs fois et on a fini par accepter car il pro­po­sait beau­coup d’argent et beau­coup de choses. Mais après la sig­na­ture, on cherche les promess­es des busi­ness­man. Cer­taines n’ont pas été tenues. » Il ajoute, sans ren­tr­er dans les détails : « C’est don­nant-don­nant, tu donnes des streams, je te donne de l’argent. Si tout le monde par­le de toi, tu es le meilleur, sinon, on a pas le temps pour toi. » Mal­gré son con­trat de disque en main, l’artiste assure avoir gardé toute sa lib­erté de créer : « On me laisse faire tout ce que je souhaite. Je devais faire un album plus court, j’ai finale­ment livré vingt morceaux sans problèmes. »

En évo­quant la course aux chiffres de vente, nous rebondis­sons. Que pense-t-il du suc­cès toni­tru­ant de Soolk­ing, un rappeur algérien forte­ment inspiré de musique aux accents raï ? La réponse est cinglante : « C’est un très bon gars, il a dévelop­pé sa car­rière mais il n’a pas dévelop­pé le raï. Il fait de la musique pour les radios, je fais autre chose. Il est Algérien, je suis Maro­cain, donc on se com­prend, mais à chaque fois qu’il ren­tre en stu­dio j’imagine qu’il pense à avoir des streams. » Il regrette : « Ce n’est pas une cri­tique, c’est un bon choix, mais tu peux per­dre ton iden­tité en tra­vail­lant tout le temps comme ça. »

C’est plutôt dans une nou­velle vague artis­tique maro­caine qu’Issam entend s’inscrire : « ElGrandeTo­to, le col­lec­tif NAAR… Ils sont tous très tal­entueux et très jeunes. Percer c’est envoy­er ta musique à l’étranger et cer­tains réus­sis­sent déjà. Exporter ta musique quand tu es Maro­cain c’est dif­fi­cile, mais les réseaux soci­aux aident beau­coup et tu peux te faire con­naître très rapi­de­ment en toute indépen­dance. » Un mantra artis­tique et humain, sans concessions. 

بالعربية

لقراءة الترجمة بالضغط هنا : عصام سفير الحرية

ترجمة Widad Jeljouli et Jami­la Karzazi

 

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